Publié par CONTRETEMPS
Après la victoire d’Emmanuel Macron et de Marine Le Pen au premier tour de l’élection présidentielle, la campagne de second tour semble approfondir les effets de ce désastre. Nous sommes face à une alternative terrible : une candidate néofasciste présentant habilement son programme ultra-autoritaire, nationaliste et raciste comme la solution aux problèmes socio-économiques des classes populaires blanches, face au plus parfait représentant des partis responsables de décennies de politiques antisociales, oppressives et antidémocratiques, et des capitalistes qui en bénéficient.
Farouchement opposé-e-s au néofascisme de Le Pen, mais combattant également le néolibéralisme effréné dont Macron était déjà l’un des accélérateurs dans le gouvernement sortant, comment pouvons-nous intervenir dans cette situation ?
L’ « extrême-centre » néolibéral : un triomphe fragile
Qui aurait pu le prédire il y a quelques mois ? Emmanuel Macron, l’ancien banquier, le politicien néolibéral par excellence des cinq dernières années, semble avoir réussi le hold-up parfait, passant du statut de ministre des finances du plus impopulaire gouvernement de la Ve république, à celui d’homme “nouveau”, hors et au-dessus des partis, susceptible de rafler la mise du ras-le-bol qui cherchait à s’exprimer contre un gouvernement austéritaire et autoritaire. Et dans un second tour qui n’est pas sans rappeler le face-à-face Clinton-Trump, Macron doit peut-être sa place à certains de ses points communs avec Trump : il a pu faire passer au second plan son passage par le gouvernement pour se présenter comme un outsider politique et un expert financier.
Ce dernier point nuance l’apparent triomphe électoral d’un représentant de la continuité. Or, cette victoire d’Emmanuel Macron au premier tour a pour revers la défaite des deux grands partis néolibéraux. On le sait, la victoire promise aux Républicains (LR) du fait de l’impopularité du gouvernement sortant, leur a échappé notamment sous l’effet de l’accumulation des scandales autour de la campagne Fillon. Et le candidat officiel du Parti Socialiste a quant à lui remporté un score historiquement bas, après le blocage de la campagne de continuité souhaitée par les cadres du PS par un vote anti-Valls à la primaire, entraînant le départ d’une partie de ces cadres vers la campagne Macron. Les deux piliers du « bipartisme à la française » n’ont recueilli que 26% des suffrages au premier tour.
Certes, les dirigeants historiques du PS remportent une sorte de victoire avec Macron, alors que tout indiquait que cette élection était perdue pour eux. Mais c’est une victoire de justesse, car même avec les voix de Macron, les candidats néolibéraux issus du gouvernement et de l’opposition LR ne totalisent pas plus de la moitié des suffrages exprimés du premier tour. Et le soutien obtenu par Macron au premier tour est extrêmement fragile. Quoi que l’intéressé en dise, le vote Macron impliquait encore moins d’adhésion que le vote Hollande en 2012 par exemple. La plupart de ses électrices/teurs n’ont pas cru une seconde qu’il était porteur d’une profonde transformation politique. Une partie d’entre elles/eux auraient voté pour LR sans les scandales Fillon. Une autre, plus grande encore, s’est laissée convaincre de ne pas voter Hamon ou même Mélenchon, parce que Macron a été présenté comme le moyen le plus sûr d’éviter un second tour Fillon-Le Pen.